Dans le monde de Donald Trump, Jair Bolsonaro et Matteo Salvini, chaque jour porte sa maladresse, sa polémique, son coup d'éclat. Aux yeux de leurs électeurs, les défauts des leaders populistes se muent en qualités. Leur inexpérience est la preuve qu'ils n'appartiennent pas au cercle corrompu des élites et leur incompétence, le gage de leur authenticité. Les tensions qu'ils produisent au niveau international sont l'illustration de leur indépendance et les théories du complot qui jalonnent leur propagande, la marque de leur liberté de penser.Pourtant, derrière les apparences débridées du carnaval populiste, se cache le travail acharné de spin-doctors, d'idéologues et d'experts du Big Data, sans lesquels ces leaders populistes ne seraient jamais parvenus au pouvoir. Dans ce livre, Giuliano da Empoli brosse le portrait de personnages presque tous inconnus du grand public, et qui sont pourtant en train de changer les règles du jeu politique et le visage de nos sociétés.
L'horreur du «califat » de Daesh au Levant entre 2014 et 2017 et son terrorisme planétaire ont été une conséquence paradoxale des «printemps arabes» de 2011. Pourtant ceux-ci avaient été célébrés dans l'enthousiasme des slogans démocratiques universels et de la «révolution 2.0».
Comment s'est installé ce chaos, et peut-on en sortir pour de bon après l'élimination militaire de l'«État islamique»?
Ce livre replace les événements en contexte, depuis la guerre d'octobre 1973 (du «Kippour» ou du «Ramadan»), suivie de l'explosion des prix du pétrole et de la prolifération du jihad, à travers ses trois grandes phases depuis l'Afghanistan et Al-Qaïda. Puis il propose le premier récit complet rétrospectif des six principaux soulèvements arabes, de la Tunisie à la Syrie.
Il expose enfin lignes de faille et pressions migratoires en Méditerranée et au Moyen-Orient, et éclaire les choix décisifs qu'auront à faire Emmanuel Macron, Donald Trump ou Vladimir Poutine, ainsi que les peuples et les dirigeants de cette région - mais aussi les citoyens de l'Europe.
Nourri de quatre décennies d'expérience, de séjours sur le terrain, avec des cartes inédites, Sortir du chaos est de la plume de Passion arabe et offre la précision de Terreur dans l'Hexagone - les deux grands succès récents de l'auteur.
François Bizot, membre de l'École française d'Extrême-Orient, est fait prisonnier au Cambodge par les Khmers rouges, en 1971. Enchaîné, il passe trois mois dans un camp de maquisards. Chaque jour, il est interrogé par l'un des plus grands bourreaux du vingtième siècle, futur responsable de plusieurs dizaines de milliers de morts, aujourd'hui jugé pour crimes contre l'humanité : Douch.
Au moment de la chute de Phnom Penh, en 1975, François Bizot est désigné par les Khmers rouges comme l'interprète du Comité de sécurité militaire de la ville chargé des étrangers auprès des autorités françaises. Il est le témoin privilégié d'une des grandes tragédies dont certains intellectuels français ont été les complices.
Pour la première fois, François Bizot raconte sa détention. Grâce à une écriture splendide et à un retour tragique sur son passé, l'auteur nous fait pénétrer au coeur du pays khmer, tout en nous dévoilant les terribles contradictions qui - dans les forêts du Cambodge comme ailleurs - habitent l'homme depuis toujours.
Fondé sur une étude historique inédite des financements privés et publics de la démocratie dans une dizaine de pays sur plus de cinquante ans, ce livre passe au scalpel l'état de la démocratie, décortique les modèles nationaux et démontre l'ampleur du malaise. Il propose aussi des pistes pour repenser de fond en comble la politique. Une personne, une voix : la démocratie repose sur une promesse d'égalité qui trop souvent vient se fracasser sur le mur de l'argent. Financement des campagnes, dons aux partis politiques, prise de contrôle des médias : depuis des décennies, le jeu démocratique est de plus en plus capturé par les intérêts privés. Se fondant sur une étude inédite des financements politiques privés et publics dans une dizaine de pays sur plus de cinquante ans, Julia Cagé passe au scalpel l'état de la démocratie, décortique les modèles nationaux, et fait le récit des tentatives - souvent infructueuses, mais toujours instructives - de régulation des relations entre argent et politique. Aux États-Unis, où toute la régulation de la démocratie a été balayée par idéologie, le personnel politique ne répond plus qu'aux préférences des plus favorisés. En France, l'État a mis en place un système de réductions fiscales permettant aux plus riches de se voir rembourser la plus grande partie de leurs dons aux partis politiques, alors que les plus pauvres, eux, paient plein pot. Ces dérives ne viennent pas d'un complot savamment orchestré mais de notre manque collectif d'implication. La question du financement de la démocratie n'a jamais véritablement été posée ; celle de la représentation des classes populaires doit l'être sur un mode plus radical. Pour sortir de l'impasse, voici des propositions qui révolutionnent la façon de penser la politique, des réformes innovantes pour une démocratie retrouvée.
Greta Thunberg est l'icône engagée dans le combat contre le dérèglement climatique depuis sa grève scolaire devant le Parlement suédois tous les vendredis, à partir de l'été 2018. Elle mobilise à l'échelle planétaire, bien au-delà de sa génération et elle influence jusqu'aux déclarations sinon l'action des dirigeants politiques, économiques, religieux.Avec elle, nous sommes largement dans l'univers des formes:des apparitions, des gestes, du langage, de la voix, du visage, des vêtements, des coiffures. Elle entraîne, elle convertit, elle ennuie ou elle exaspère par les formes qu'elle donne à son engagement à travers ses actions reprises dans les médias:réseaux sociaux, vidéos, photographies, caricatures, BD, série télévisuelle, logos, produits dérivés.Même les mots qu'elle emploie, qu'elle répète, qu'elle combine, finissent par agir comme des images mentales contagieuses et ces mots ont la forme de la rébellion, de l'espoir et du désespoir, mais aussi d'une nouvelle raison écologique anxieuse qui s'impose de plus en plus largement.Quand elle dit qu'un jour l'ours polaire privé de sa banquise est resté bloqué dans sa tête, il faut la croire pour entrer dans sa danse.
« Se plonger dans les histoires de drogue est l'unique point de vue qui m'ait permis de comprendre vraiment les choses. Observer les faiblesses humaines, la physiologie du pouvoir, la fragilité des relations, l'inconsistance des liens, la force colossale de l'argent et de la férocité. L'impuissance absolue de tous les enseignements mettant en valeur la beauté et la justice, ceux dont je me suis nourri. La coke était l'axe autour duquel tout tournait. La carte du monde était certes dessinée par le pétrole, le noir, celui dont nous sommes habitués à parler, mais aussi par le pétrole blanc, comme l'appellent les parrains nigérians. Le pétrole est le carburant des moteurs, la coke celui des corps ».
Après Gomorra, Roberto Saviano poursuit son travail d'enquête et de réflexion sur le crime organisé à l'échelle mondiale. D'où le crime tire-t-il sa force? Comment l'économie mondiale a-t-elle surmonté la crise financière de 2008? Une seule et même réponse : grâce à l'argent de la cocaïne.
Extra pure nous convie à un voyage du Mexique à la Russie, de la Colombie au Nigeria, en passant par les États-Unis, l'Espagne, la France et l'Italie de la 'ndrangheta calabraise. Au fil de cette exploration, l'auteur raconte avec une puissance épique inégalée ce que sont les clans criminels partout dans le monde. Et il démonte impitoyablement tout le fonctionnement de l'économie.
Le 23 juin 2016, à la stupeur générale, les Britanniques choisissent de quitter l'Union européenne. Pourquoi cette rupture inédite et déjouant tous les pronostics? Comment organiser ce divorce? Quelle nouvelle relation bâtir entre le Royaume-Uni et l'Union?Dès le début des discussions, Michel Barnier, négociateur en chef du Brexit, a recherché l'unité des vingt-sept États membres et du Parlement européen.Nous voici pour la première fois au coeur d'une négociation complexe et historique de mille six cents jours, oscillant sans cesse entre consensus et crispations, espoirs et doutes, transparence et mensonge, pour aboutir à un accord inespéré qui modifiera durablement le visage de l'Europe.De Bruxelles à Londres, de Dublin à Nicosie, ce journal nous entraîne dans les coulisses d'un théâtre diplomatique où se joua parfois une véritable guerre des nerfs.Un témoignage exceptionnel sur l'envers du Brexit, sur l'Europe et sur celles et ceux qui la font.
Déployant une joyeuse fureur et une élégante ironie, l'illustre correspondante de guerre américaine Martha Gellhorn raconte ses cinq pires épopées autour du monde. On se réjouit de la suivre dans ses tribulations, tout en se félicitant - souvent - de ne pas être de l'aventure.
Qui n'a jamais rêvé des exploits des plus grands navigateurs ; Magellan, Christophe Colomb, Lope de Vega ou en encore Nordenskjöld, le découvreur du passage Nord-Est et commandant de l'expédition de la Vega ? Cent trente ans plus tard, cette route maritime est une de celles les plus convoitées du globe. Et pour cause : les richesses issues du sous-sol du grand Nord et l'appât des armateurs pour ce passage abolissant plus d'une distance, représentent un nouvel eldorado.
Un livre incontournable sur les dangers du réchauffement climatique menaçant l'écosystème du grand Nord, dans la grande tradition des récits de voyages d'explorateurs visionnaires.
Quand et pourquoi la Bible a-t-elle été écrite? Que savons-nous des premiers patriarches? Quand le monothéisme est-il apparu? Comment le peuple d'Israël est-il entré en possession de la Terre promise? Jérusalem a-t-elle toujours été le centre de l'ancien Israël?Pour la première fois, il est possible de répondre à ces questions avec un haut degré de certitude. Car les auteurs, Israel Finkelstein et Neil Asher Silberman, puisent leurs arguments dans les découvertes archéologiques les plus récentes, entreprises en Israël, en Jordanie, en Égypte, au Liban et en Syrie.Loin de sortir désenchanté de cette mise à plat historique du Livre des livres, le lecteur est d'autant plus fasciné par ces nomades et ces agriculteurs d'il y a trois mille ans, qui ont su fabriquer, en des temps de détresse ou de gloire, un récit dont la fécondité n'a cessé d'essaimer au-delà de ce peuple.
Il y a un malheur français, bien spécifique:pourquoi sommes-nous les champions du monde du pessimisme et du mécontentement de nous-mêmes? Pourquoi vivons-nous notre situation, notre place dans l'Europe et le monde, comme un malheur incomparable? Marcel Gauchet aborde ce problème d'une façon originale, en procédant d'abord à un vaste examen historique, qui le conduit des XVII?-XVIII? siècles jusqu'à la période immédiatement contemporaine. Au passage, il analyse en profondeur le règne de De Gaulle et celui de Mitterrand, l'un et l'autre matriciels pour comprendre notre présent.Puis il s'attaque aux ressorts de la société française d'aujourd'hui, dont il dissèque les maux:pourquoi la mondialisation et l'insertion dans l'ensemble européen sont-elles ressenties en France avec une particulière inquiétude? Pourquoi le divorce entre les élites et le peuple prend-il chez nous ce tour dramatique? Quelle responsabilité incombe aux dirigeants dans la montée de ce qu'on appelle, sans beaucoup y réfléchir, «populisme»? Quel rôle enfin joue, dans le marasme français, le néolibéralisme, cette idéologie qui veut se confondre avec le cours obligatoire des choses et qui porte en elle la dépolitisation de nos sociétés, à laquelle Mitterrand a converti la France sans le dire?
Comment l'humanité est-elle née ? Sommes-nous maître de notre destin ? Depuis des millénaires, ces questions n'ont cessé d'agiter les hommes, et si aujourd'hui la science est en mesure d'apporter quelques éléments de réponse, la religion, bien avant elle, a été la seule à fournir des explications.
Mais il ne faut pas seulement voir dans la Genèse, premier livre de la Bible et socle commun à la religion chrétienne et juive, une simple solution au mystère de l'origine du monde. C'est un ouvrage dans lequel se confondent histoire et légendes, le récit d'une généalogie commune, une peinture de la nature humaine dans ce qu'elle a de plus beau et de plus cruel.
Du jardin d'Eden au désert égyptien, de Noé à Moïse, que l'on soit chrétien, juif, musulman ou même athée, il est essentiel d'étudier ce texte fondateur sur lequel repose les bases de la culture occidentale.
Depuis 2018, Teresa Cremisi écrit toutes les semaines dans le Journal du Dimanche une chronique appelée « Ma tasse de café ».
Les 100 textes choisis et présentés dans ce recueil sont autant de petits hublots sur notre époque. Elle y attrape l'air du temps avec une gravité espiègle qui s'adapte aux sujets les plus variés. Des histoires proches et lointaines (presque de petits récits) alternent avec des réactions à l'actualité politique et sociale ; les clichés, les ridicules, les tics de langage de nos contemporains sont racontés avec amusement, en évitant tout dogmatisme.
L'inégalité, ou : pourquoi y a-t-il des riches et des pauvres ? À cette question essentielle de l'économie, Pierre-Noël Giraud apporte une réponse originale : plutôt que de mettre en rapport inégalité sociale et croissance dans chaque pays, il préfère embrasser, sur deux siècles, les inégalités internes et externes, sociales et spatiales, des capitalismes, restituant, par là même, la dynamique de l'économie du monde contemporain. Émergence des inégalités entre pays, réduction des inégalités sociales internes en fin de période, tel aura été - du XVIIIe siècle aux années 1970 - le double mouvement d'ensemble de l'inégalité du monde. Or, depuis vingt ans, ce mouvement s'inverse.
Un rattrapage des pays riches extrêmement rapide a été entamé, non seulement par les « nouveaux pays industrialisés » (Corée du Sud, Taiwan, Singapour), mais aussi par les vastes « pays à bas salaire et à capacité technologique » : la Chine, l'Inde, l'ex-Union soviétique.
Cependant, cette réduction des écarts entre pays s'accompagne, au sein des pays riches, d'une croissance des inégalités polarisant la société en une minorité de « compétitifs » et un large groupe de « protégés » qui deviennent les clients des premiers. Nous sommes désormais entrés dans une nouvelle ère de l'inégalité du monde.
Depuis la crise des subprimes, on sait que l'économie n'est pas la science infaillible qu'elle prétendait être. Et pourtant, dans l'Occident post-religieux, le discours économique semble avoir pris la place du sacré. Ce culte a pour principe divin le Marché, incarné par une multitude de Marchés dont l'appétit n'est apaisé que par la croissance. Il a pour valeur cardinale la liberté d'entreprendre, pour idéal l'équilibre et pour credo l'infinitude du monde, condition à la satisfaction des dieux. Il a ses temples, ces grandes bâtisses d'allure gréco-romaine où valsent les indices, reflets des humeurs divines changeantes. Il a ses rites de consommation ; il a son clergé, la finance, et ses archiprêtres, les grands banquiers centraux, seuls capables d'apaiser la colère des dieux. Progressivement, depuis le XVIII e siècle, l'économie a acquis l'autorité dont était investie la religion. Elle ne s'attaque plus à l'astronomie et à la biologie, comme le christianisme avant elle, mais s'en prend à l'écologie et à toutes les sciences qui fixent des limites au Marché. Le nouveau Jupiter, c'est lui. Une fascinante enquête historico-économique à la recherche des ressorts profonds du système économique qui nous régit.
8 février 1962:en réaction à l'offensive terroriste de l'OAS, une manifestation se heurte à la violence voulue de l'État. À la station de métro Charonne, devant les portes ouvertes, on relèvera neuf morts sous les coups de la police. Au-delà de la reconstitution des faits avérés, Alain Dewerpe pose des problèmes historiques d'un ordre plus général dans un livre qui servira de modèle à d'autres. Il traite d'abord de la violence d'État en démocratie représentative:organisé ou non, planifié ou non, le meurtre politique fait partie de l'outillage des actes d'État; il a, même obscures ou contournées, ses raisons et son efficace. Il pose la question du scandale civique:à quoi l'État a-t-il droit? L'affaire pourrait se dénouer par la mise en place d'un récit moralement et politiquement fondé et partagé. Or, à travers une version d'État mensongère jusqu'à nos jours, ce règlement est demeuré historiquement instable. Il ouvre également sur les usages politiques et sociaux de la mort:la manifestation-obsèques du 13 février fut un des plus considérables rassemblements dans la France du XX? siècle. Comment comprendre alors que cette mémoire du massacre, faite de commémorations mais aussi de censures, de souvenirs mais aussi d'oublis, s'est effritée devant d'autres événements traumatisants de la guerre d'Algérie? Faut-il l'écrire? Cet ouvrage est unique en son genre.
«L'agonie du Tibet, écrit Élisabeth Badinter dans sa préface au livre de Pierre-Antoine Donnet, ce n'est pas seulement des hommes assassinés, des nonnes et des prêtres torturés, des milliers de gens déportés dans des camps de rééducation, c'est aussi un véritable génocide culturel, linguistique et religieux. La sinisation systématique du Tibet est à moyen terme sa mort assurée. Et cela dans l'indifférence quasi générale».
L'une des tragédies de ce siècle se joue actuellement au Pays des Neiges. Depuis son invasion par la Chine en 1950, le Tibet est asservi et colonisé. Tibet mort ou vif veut d'abord informer. Recueillis auprès des protagonistes tibétains aussi bien que chinois, de nombreux témoignages inédits et des documents exclusifs offrent un regard neuf sur ce choc de deux grandes civilisations dont les répercussions sont incalculables. Chef spirituel et temporel de six millions de Tibétains, le dalaï-lama, Prix Nobel de la paix 1989, y exprime son parti pris de tolérance et de non-violence. Avant qu'il ne soit trop tard...
Les malheurs du temps - la guerre, la famine ou la peste - nous sont connus grâce à des témoignages. Grandes plumes nobles, littérateurs ou gens sans qualité, ces écrits divers sont autant de sources pour les récits et les analyses des historiens. Leur usage pose pourtant problème. Dès le XVIIe siècle, en effet, inscrire un témoignage sur le papier faisait participer à une culture écrite orientée par la circulation de débats, de normes et de discours constitutifs de ce qui commençait à devenir la littérature.
Ce livre raconte les « malheurs du temps » à partir de documents, récits de peste, lettres d'administrateurs, journaux, sermons, poèmes. Chemin faisant, il étudie la mise en écriture des expériences vécues et l'utilisation des textes littéraires par les historiens. Les auteurs rouvrent ainsi de nombreux dossiers historiographiques : par exemple celui des « Mémoires du XVIIe siècle », artificiellement érigés par l'histoire littéraire en conservatoire de l'identité et des valeurs nobiliaires ; celui de la terrible famine de 1662 ; celui des écrits paysans mis au service de l'histoire du siècle des Lumières ; et bien évidemment celui de la composante émotionnelle des anciennes mises en récit du malheur, qui n'est pas sans effet sur notre propre émotion face à ces témoignages écrits.
Le 17 décembre 2010, à Sidi Bouzid, en Tunisie, Mohamed Bouazizi, vendeur ambulant de fruits et légumes, s'immole par le feu - et embrase le monde arabe. Les régimes de Ben Ali, Moubarak, Kadhafi sont précipités dans les flammes, et l'incendie porte à Bahreïn, au Yémen et jusqu'en Syrie.
En deux ans, les révolutions ont abattu des dictatures, mais fréquemment porté au pouvoir les Frères musulmans. Le salafisme prolifère, nourri par le désenchantement de jeunes et de déshérités dont la pauvreté s'est accrue. Al-Qaida, qu'on croyait enterrée, resurgit de la Syrie au Mali alors que l'État islamique prône un nouveau califat.
Gilles Kepel est retourné partout - Palestine, Israël, Égypte, Tunisie, Libye, Oman, Yémen, Qatar, Bahreïn, Arabie saoudite, Liban, Turquie, Syrie, Kabylie - et a rencontré tous les acteurs - salafistes et laïcs, Frères musulmans et militaires, djihadistes et intellectuels, ministres et fellahs, diplômés-chômeurs et rentiers de l'or noir.
Pour comprendre ce que sont devenues la liberté, la démocratie, la justice sociale revendiquées par les «printemps arabes». Quel est le rôle des pétromonarchies du Golfe dans l'arrivée au pouvoir des partis islamistes? Pourquoi le conflit entre sunnites et chiites est-il en train de détourner l'énergie des révolutions, tandis que la Syrie s'enfonce dans des souffrances inouïes?
Des innovations mort-nées de Bill Gates ou Steve Jobs aux rêves de grandeur de Jean-Marie Messier, de Kodak qui ne croyait pas à la photo numérique à Mamie Nova qui se moquait des grand-mères, de l'échec de Barbie en Chine à celui de Renault en Inde, des performances viciées de Madoff et de Kerviel à l'explosion « programmée » de la navette Challenger, de Danone à Orange, Google ou Volkswagen, voici l'histoire de cent cinquante décisions qu'il eût fallu éviter. Si elles ont marqué l'histoire industrielle, elles ont très rarement été l'objet d'une enquête minutieuse à travers un récit qui fourmille d'anecdotes et de révélations.
L'évolution de la justice, de l'Ancien Régime à nos jours, est le plus souvent présentée comme un processus de rationalisation, homogène et global, qui s'imposerait progressivement aux Français: l'Etat aurait monopolisé à son profit la violence, élargi son domaine d'intervention, reculé sans cesse les limites entre le privé et le public, et discipliné la population par des mécanismes d'obéissance. Cette vision, quant au fond inexacte, fait de l'Etat l'acteur principal. Or les modes de fonctionnement de la justice, depuis le XVIe siècle, s'expliquent d'abord par les demandes des justiciables. En outre, malgré l'apparent bouleversement de la Révolution, les continuités l'emportent sur les ruptures. S'il est une rupture essentielle, elle s'est produite à la fin du Moyen Age, avec l'affirmation de la justice de l'Etat, l'adoption de la procédure inquisitoire dans la justice pénale et du système des preuves dites " rationnelles ". Ces nouveautés créent la justice moderne; tout en évoluant, elles dominent jusqu'à l'époque contemporaine. Voilà qui offre à l'historien la possibilité de rendre compte de la " judiciarisation ", c'est-à-dire d'écrire une histoire à la fois de l'institution, des normes mais aussi des pratiques. En d'autres termes, une histoire sociale de la justice, de l'Ancien Régime à nos jours.
Nechung, l'oracle d'État tibétain qui ne s'est jamais trompé, Sam Begay, l'homme-médecine navajo qui soigne avec la beauté, Emily Kame Kngwarreye, la «Matisse du désert australien», sont les guides de cette enquête inédite au coeur des savoirs indigènes. Trois initiateurs, trois peuples, et trois thèmes : la prophétie, la santé et l'art.Ni voyageurs en quête d'exotisme, ni ethnologues bardés de certitudes, Sylvie Crossman et Jean-Pierre Barou ont approché au plus près ces maîtres, reçu leurs confidences, partagé leur vie et leurs cérémonies sur les contreforts de l'Himalaya, les hauts plateaux d'Arizona et aux confins de l'Australie.Nous découvrons avec eux que les sagesses ancestrales sont connaissance véritable - qu'étudient désormais les scientifiques occidentaux les plus émérites comme le montre la postface inédite consacrée aux «nouveaux matérialistes».
" La Tchétchénie, c'est comme 1937, 1938 ", me déclare dans son petit bureau moscovite un des dirigeants de Memorial, la plus grande association russe des Droits de l'homme.
" On achève un vaste programme de construction, les gens reçoivent des logements, il y a des parcs où les enfants jouent, des spectacles, des concerts, tout a l'air normal et... la nuit, des gens disparaissent." C'est ce même homme qui m'a décrit la " tchétchénisation ", nom donné à la décision prise par Vladimir Poutine en 2002 d'installer un pouvoir tchétchène prorusse fort, principalement composé d'anciens rebelles, dirigé par l'ex-mufti indépendantiste Akhmad- Khadzhi Kadyrov, comme le " transfert du pouvoir de mener des violences illégales des structures fédérales aux structures locales".
Et il était d'accord que cette " tchétchénisation " avait entraîné un réel changement : "Les violences ne sont pas moins cruelles, mais elles sont plus sélectives."
Les mutations récentes qu'a connues l'histoire comme discipline (tant sur la plan des pratiques que sur le plan du savoir), mais aussi l'arrivée sur le devant de la scène d'une nouvelle génération d'historiens soucieux de se démarquer de la précédente, nourrissent les interrogations de la profession sur son identité et sur son avenir.Gérard Noiriel mesure l'ampleur structurelle de cette «crise» en la situant dans le prolongement des relations contradictoires que l'histoire entretient avec la philosophie. Contestant l'idée que le «retour du récit» pourrait résoudre les difficultés actuelles, l'auteur nous invite à relire le «testament» de Marc Bloch - Apologie pour l'histoire - afin d'y puiser les matériaux nécessaires à l'élaboration d'une définition «pragmatiste» de la discipline. La réflexion sur la connaissance historique est conçue ici comme un travail collectif de clarification des pratiques de recherche visant à mieux comprendre, donc à mieux maîtriser, les activités de savoir, de mémoire et de pouvoir qui entrent dans l'exercice du «métier d'historien».